Ce jeudi de la mi mars, toute la troupe du Temps d’un Café s’est retrouvée au Métro Gramont, les visages étaient souriants et la bonne humeur fleurait le printemps, le soleil était de la partie, tout était pour le mieux, nous étions alléchés par la perspective de retrouver notre guide préférée !
Oui Amélie était à la manœuvre pour nous piloter au sein de St Pierre des Chartreux, et c’était l’assurance d’une excellente visite, détaillée à souhait avec les anecdotes et ingrédients qui donnent toute leur saveur à l’exercice ô combien périlleux de la remontée des siècles !
La rue Valade était déserte, l’air embaumait le kebab et la friture, c’était le temps du déjeuner pour les travailleurs…
Une photo de l’ensemble du groupe et hop on s’engouffre dans le Saint des Saints, point de silence pour nous, bien au contraire !
Enfin dans le Saint des Saints, c’est beaucoup dire, puisque notre charmante guide nous emmène à quelques enjambées d’ici pour nous montrer ce qu’il reste du cloître jadis si bien organisé ceint de ces petites maisons (hélas disparues) où vivaient nos moines.
Tout commence par une remontée aux sources des chartreux et le lien avec la chartreuse grenobloise… le monde est petit n’est ce pas ?
Et donc, nos vaillants chartreux mis à mal par les guerres de religion, chassés de Saïx, ont choisi notre belle ville rose en achetant des terres à l’Abbé de Moissac, et après une période transitoire, en 1602, ils se mettent à construire un monastère pour se ressourcer et accomplir leur vœu de vie : silence, solitude et prières. Et cette vie était remplie tambour battant : pensez donc, qui saurait suivre un tel régime, en se couchant à 21h et se relever en pleine nuit pour prier de minuit à 3h du matin pour se lever à nouveau à 6h et commencer une nouvelle journée de silence et prières entrecoupées de menus travaux ou de jardinage, fort heureusement il y avait le dimanche pour pouvoir papoter un brin ! Tenez, cela me rappelle le souvenir de ces braves Anglais qui, il n’y a pas si longtemps encore, tondaient rituellement leur gazon le samedi en conversant avec leurs voisins, ils étaient un peu comme nos chartreux : travail toute la semaine sans relâche et échanges cordiaux le week-end…
Aujourd’hui, il ne reste que la clôture en briques pour nous rappeler ce temps monacal. Les maisonnettes et leur jardinet et le chemin en bordure ayant hélas, été rasés.
Enfin, le passage de la vie de campagne à la vie citadine a été une étape où ces religieux, avides de suivre les pas des anciens ermites à la vie austère, ont montré toute leur force de caractère. C’était une existence solitaire dans un désert tout en vivant en communauté.
Et ils étaient à bonne école, avec Saint Bruno qui, fort de ses convictions, avançait invariablement son refus aux bienveillantes offres papales. Venu de Cologne, en passant par la champagne rémoise et la chartreuse grenobloise, jusqu’en Calabre où il finit ses jours, il vécut une vie remplie de sagesse, accomplissant même quelques miracles tel celui de la source qui jaillit à ses pieds.
La construction de cette bâtisse se fait au gré des dons, le plan est plutôt original, avec une courte nef, un sanctuaire carré surmonté d’un dôme et des bras de transept peu profonds, et par delà ce sanctuaire, la partie réservée aux moines qui pouvaient se retrouver en communauté pour chanter les offices et célébrer la quotidienne messe.
La Vierge Marie et Saint Paul Ermite sont leur consécration.
Et ils vivent bien et réalisent pleinement leurs vœux jusqu’en 1790 où la Révolution supprime les Ordres Religieux. Et l’église des infortunés moines devient église de la Paroisse Saint Pierre en remplacement de l’église St Pierre des cuisines trop vétuste et le reste des bâtiments est transformé en arsenal.
Le portail qui nous a donné accès à la chartreuse date de 1613 ; il est agrémenté des statues de St Pierre, du Christ et de St Bruno.
En entrant dans l’atrium on est frappé par la clarté des lieux, des tableaux de dimension respectable habillent les murs blancs. Un passage nous mène à une galerie en briques jalonnée de colonnes, avec un ravissant jardinet tout en longueur qui court le long de l’église qui est divisée en 3 parties, la première destinée aux paroissiens, l’autre bout étant réservé aux religieux et entre les deux le chœur de forme imposante et d’une grande clarté, avec un dôme carré. Dont le chapeau est surmonté de la statue de St Jean Baptiste. Quelques commentaires malicieux ont été entendus à son sujet…
L’épisode « AZF » a laissé des traces avec la construction de deux contreforts maçonnés en brique rouge pour soutenir le mur de la nef qui s’était trouvé affaibli par l’explosion.
De chaque côté de la nef se trouvent plusieurs chapelles aux plafonds peints.
L’originalité du maître-autel réside dans sa monumentalité, avec un retable et un tabernacle en harmonie, ce qui permettait aux chartreux de se préserver du regard de la population. A gauche de la nef on a remarqué cette chaire en bois sculpté, venue de St Pierre des Cuisines tout comme l’orgue qu’il a fallu raccourcir, originaire, lui, du couvent des jacobins. Cette chaire repose sur la proue d’une barque rappelant que St Pierre était un pêcheur quand il a rencontré le Christ.
Le tour du chœur est vite fait par une étroite galerie et nous sommes arrivés dans la chapelle du Sacré-Cœur, les bancs richement travaillés longent les parois et sont surmontés de galeries de toiles et bas reliefs.
Les toiles illustrent la vie de St Bruno et des saints ermites, les bas reliefs représentant les vertus : Oraison, Prudence, Charité, Foi avec en face le Silence, la Force, l’Obéissance, la Justice…
Nous avons terminé par une chapelle tout de bois de noyer habillée, dédiée à la Sainte Croix. Et en levant les yeux une magnifique Cène s’offrait à nous, belle illustration de l’Eucharistie.
Et comme tout a une fin, une fois la porte à deux battants et claire-voie présentant sur ses volets les profils du Christ et de la Vierge, de St Paul ermite et St Jean Baptiste surmontée d’un tympan sculpté en bas-relief d’anges portant la croix, franchie, il ne nous restait plus qu’à applaudir et remercier chaleureusement notre Amélie la normande, avec la perspective de futures retrouvailles enrichissantes dans notre bonne ville de Toulouse. Le collège de Foix était évoqué, mais c’est une autre histoire… Il suffit de suivre le feuilleton, et le Temps d’un Café vous dit à très bientôt, chers lecteurs assidus de la rubrique « sorties » de l’Association.
Jean Noël
Normande ou Bretonne Amélie?????